Musée San Marco à Florence

Je suis retournée récemment avec plaisir visiter le musée de San Marco à Florence. C’est un ancien couvent dominicain connu pour son architecture de renaissance et les fresques de Fra Angelico. Il a été transformé en un musée et il garde son atmosphère unique et des œuvres inestimables. Pourtant, le couvent San Marco n’est pas tellement connu par des touristes même si l’on peut y trouver toujours quelques personnes francophones.


Le cloître de Michelozzo

HISTOIRE
Le couvent San Marco a été donné aux frères dominicains au début du 15e siècle, mais dans un état de dégradation. Cosme l’Ancien a payé la reconstruction du lieu en engageant son architecte préféré Michelozzo. Il souhaitait renouveler toute la zone à côté du nouveau palais pour la famille des Médicis. C’était pour lui une question de prestige, mais aussi un moyen d’obtenir l’appui du peuple dans son ascension au pouvoir. Peu de temps après, frère Giovanni, passé à l’histoire comme Fra Angelico, a décoré le couvent avec ses fresques. San Marco garde aussi la mémoire d’une figure controversée, Girolamo Savonarola, exécuté comme hérétique le 23 mai en 1498 dans la piazza della Signoria à Florence.

Aujourd’hui, les espaces du couvent ont été transformés en un musée enrichi en peintures provenant des églises désaffectées.


Fresques avec la vie d’Antonino Pierozzi

LE CLOÎTRE PRINCIPAL
C’est le premier espace que l’on voit après la billetterie. Le cloître a été projeté par Michelozzo suivant des nouveautés introduites par Brunelleschi. Les éléments classiques comme les colonnes, les arcs en plein-cintre, les chapiteaux s’entremêlent aux matériaux caractéristiques pour Florence: la pierre blanche et la pietra serena grise.

Dans le cloître, vous pouvez trouver quelques fresques de Fra Angelico. Par exemple celle avec Saint Dominique, fondateur de l’ordre, au pied de la croix. Une grande quantité de bleu obtenu de pierre précieuse : lapis-lazuli a été utilisé pour cette décoration et une atmosphère de contemplation nous invite à respecter le caractère du lieu.

En haut, sous les arches, il y a des fresques du 17e siècle qui racontent la vie et les miracles du prieur du couvent : Antonino Pierozzi. Il était très aimé par les Florentins, il est ensuite devenu archevêque de la ville et il a été canonisé après sa mort. Dans quelques scènes, on peut voir l’architecture de Florence et des personnages connus comme Cosme l’Ancien où même Savonarola.


La salle avec des peintures de Fra Angelico

HOSPICE
Auparavant, la salle juste à côté de l’entrée servait à accueillir des pèlerins. Aujourd’hui, elle conserve des retables de Fra Angelico. Le peintre était un frère dominicain, voué à la pauvreté mais dans son art il aimait bien l’or, les couleurs riches et lumineuses et la représentation des détails précieux. Ici, on peut admirer : la minutieuse Déposition de l’église Santa Trinitala Pala Annalena, une première œuvre sur bois de forme rectangulaire;  la Pala San Marco, venant de l’autel de l’église du même nom et le Tabernacle des Linaioli. Moi, j’aime particulièrement des œuvres en miniature où on admire le talent de Fra Angelico en enluminure.
Cela me plaît beaucoup d’observer tous les détails de petits retables de l’Armoire de l’Argenterie avec des scènes du Nouveau Testament.

Dans plusieurs scènes, on aperçoit les saints Cosme et Damien et leurs histoires sont illustrées dans des prédelles. Savez-vous pourquoi ? Ils étaient des protecteurs de la famille Médicis, les patrons par excellence de l’art à Florence à l’époque.


La salle du chapitre – le couvent San Marco

SALLE DU CHAPITRE
Cette salle était utilisée par les dominicains pour la lecture, la prière et des réunions. Ici, sur le mur entier, règne la grande fresque de la Crucifixion peinte par Beato Angelico. On a décidé de représenter non seulement les dominicains et les saints florentins, mais aussi les personnages d’autres ordres, par exemple Saint-Antoine Abbé, Saint Bénédicte, Saint-François, Saint Jérôme, etc.

LAVABO ET RÉFECTOIRE
Le grand réfectoire où les frères consommaient des repas est précédé par la salle du lavabo où ils se rafraîchissaient et des salles de cuisine.
Aujourd’hui, dans le lavabo et la cuisine, on peut trouver des œuvres de Fra Bartolomeo, un autre peintre dominicain, mais beaucoup moins connu de Fra Angelico. Il connaissait Savonarola et en était tellement impressionné qu’il avait détruit toutes ses peintures laïques. Sa toile la plus belle, c’est la Pala della Signoria en monochrome et inachevée. On admire vraiment le talent de Bartolomeo dans le dessin et les leçons apprises de Raphaël. La toile destinée au Palazzo Vecchio a changé beaucoup de fois de propriétaires pour finalement retrouver sa place dans le couvent.


Pala della Signoria, Fra Bartolomeo

Dans le réfectoire, la grande fresque montre le miracle du pain porté aux frères par les anges. Elle a été peinte au 16e siècle par Giovanni Antonio Sogliani. Ici, on trouve d’autres artistes inspirés par Fra Bartolomeo comme par exemple la première femme peintre que l’on connaît à Florence, Plautilla Nelli.
C’est vraiment incroyable de penser qu’elle avait appris la peinture seulement en copiant les dessins et les œuvres d’autres peintres. Elle n’avait pas eu d’accès à l’apprentissage en tant que femme et une religieuse. Dans la salle, se trouve son tableau La Déploration sur le Christ mort.

CELLULES DES FRÈRES
Mais les fameuses cellules décorées avec des fresques de Fra Angelico ? Il faut monter au premier étage en voyant comme la première chose la merveilleuse Annonciation. Les cellules sont positionnées autour du cloître et chacune a été enrichie d’une fresque de Fra Angelico et ses collaborateurs comme Benozzo Gozzoli.


Adoration des Mages, cellule de Cosme l’Ancien

À droite de l’escalier, il y a le couloir destiné au Prieur du couvent, personnages importants et hôtes. En fait, des fresques montrent des scènes plutôt compliquées comme l’Adoration des Mages dans la cellule double destinée à Cosme l’Ancien.

Dans le couloir en face de l’escalier, il y a des scènes plus modestes venant du Nouveau Testament pendant que les cellules au fond, pour les novices sont ornées de fresques très modestes avec peu de couleurs. Leur sujet est la crucifixion avec une figure en contemplation. La simplicité des scènes devait faciliter la méditation et la prière.


Bibliothèque dans le musée de San Marco

BIBLIOTHÈQUE
Au milieu du couloir à droite, il y a la bibliothèque. Elle a été projetée par Michelozzo dans les années quarante du 15e siècle et imaginée comme un temple de savoir avec trois nefs, colonnes et voûtes. Avec sa collection des manuscrits et œuvres en grec, elle est devenue très vite un lieu favori des humanistes florentins comme Poliziano, Marsilio Ficino et Pico della Mirandola.

Aujourd’hui, elle ne conserve que quelques livres liturgiques et manuscrits enluminés. En plus, on a voulu montrer des matériels utilisés pour la technique des manuscrits.


La cellule de Savonarola avec ses objets

CELLULE DE SAVONAROLA
Au fond du couloir des novices, on a sauvegardé la mémoire de Girolamo Savonarola. Il venait de Ferrare, mais il s’était établi à Florence. Ses sermons charismatiques ont conquis avec le temps les habitants de la ville. Savonarola critiquait la lassitude des coutumes, parlait de l’Apocalypse et prêchait pour le retour à la vraie foi. Il a réussi à faire de Florence une sorte de théocratie pendant quatre ans, je vous laisse imaginer comment… Un matin, en mai 1498, il est arrêté dans le couvent San Marco et jeté en prison. Torturé, il fut exécuté dans la Piazza de la Signoria.

C’est intéressant d’apprendre que son souvenir est conservé parmi les dominicains de San Marco. Ils ont sauvegardé sa cellule privée avec des objets personnels comme la chaise, le manteau et le cilice et quelques portraits et peintures liées à son histoire.


Couloir du couvent

PETIT RÉFECTOIRE
En descendant au rez-de-chaussée, on passe par le petit réfectoire où il y a la fresque de la Dernière Cène de Domenico Ghirlandaio. Le peintre avait créé une fresque pareille dans le réfectoire de l’église d’Ognissanti à Florence. Il a donné beaucoup d’importance aux détails, la particularité dont il était très connu. Les animaux représentés ont une valeur symbolique. Le chat à côté de Jude signifie la trahison, le paon symbolise la vie éternelle et les canards probablement la tromperie et les calomnies.


Les restes de Florence médiévale

COULOIR DE LA SORTIE LAPIDARIUM
Mais ce n’est pas fini. Dans le couloir de la sortie, on a placé des restes architectoniques de Florence. À la fin du 19e siècle, le centre-ville a été totalement modifié et on a jeté et détruit beaucoup de monuments précieux de l’époque médiévale. On a préservé quelque chose ici en créant le musée de Florence du passé. Mais aujourd’hui, il n’en reste pas grand-chose. C’est vraiment dommage…


Les prédelles de Pala San Marco, Fra Angelico

INFORMATIONS PRATIQUES
Pour le moment, le musée a un web site seulement en italien.
Les infos pratiques comme les billets et les horaires sont visibles ici seulement en italien.
Je vous conseille de les consulter avant la visite. Comme le musée n’est pas tellement fréquenté, les horaires sont réduits.

Si vous désirez visiter San Marco avec moi, contactez-moi.

Chapelle Brancacci à Florence

Cette année (2022), nous avons l’occasion d’admirer de tout près un chef-d’œuvre absolu du début de la Renaissancela chapelle Brancacci (cappella Brancacci) de l’église Santa Maria del Carmine à Florence.


Les travaux dans la chapelle Brancacci

La restauration complète de la chapelle a commencé en janvier et devrait durer un an. Les autorités muséales n’ont cependant pas fermé le lieu, mais ils ont permis les visites certains jours de la semaine pour voir les fresques de près, en montant sur des échafaudages. Bien entendu, j’en ai immédiatement profité, j’ai pris des photos et je voudrais vous parler de cet endroit merveilleux.

Plan de l'église Santa Maria del Carmine à Florence
Le plan de l’église avec la chapelle Brancacci (10)

LA FAMILLE BRANCACCI
La chapelle rectangulaire, située à droite de l’autel, dans l’église carmélite de Santa Maria, appartenait à la riche famille de marchands de soie Brancacci. (Sur la photo, vous pouvez voir le plan de l’église et du monastère).

Vous devez savoir que Florence au XIVe siècle était l’une des villes les plus riches du monde, grouillant de marchands et de banquiers. Leurs fortunes étaient souvent associées à des affaires louches, à la fraude et surtout, le prêt d’argent était fortement condamné par l’Église catholique (même si elle en bénéficiait elle-même). La grande richesse était aussi mal vue.

Les aisés ont donc imaginé un moyen de leur acheter une place au moins au purgatoire : le mécénat d’églises, de chapelles, de monastères et d’œuvres religieuses. Celui qui avait le plus d’argent, investissait davantage dans l’art religieux et dans l’embellissement de la ville. Dans un article sur blog, j’ai illustré comment Cosimo Vecchio des Médicis a payé pour la restauration de l’ensemble du monastère de San Marco à Florence.

Une douzaine d’années auparavant, Felice Brancacci avait commandité la décoration de la chapelle familiale de l’église des Carmes avec des fresques représentant des épisodes de la vie de saint Pierre, le patron de la famille. La commande a été passée à l’artiste alors populaire Masolino da Panicale et à son jeune collaborateur Masaccio.

Les fresques de la chapelle Brancacci à Florence
Détail d’une fresque

TOMMASO DI SER GIOVANNI DIT MASACCIO
« Les choses créées avant lui peuvent être appelées peintes, et ses choses sont vivantes, réelles et naturelles ». Voici les paroles de Giorgio Vasari à propos de Tommaso dans sa Vie des artistes. En observant les fresques de la chapelle et les autres œuvres de Masaccio, il est difficile de ne pas être d’accord. Le jeune maître du pinceau, surnommé Masaccio (le péjoratif de Thomas), soi-disant en raison de sa négligence et de son étourderie générale, a révolutionné la manière de représenter la réalité en peinture.

Il a donné aux corps du poids, de la plasticité et de l’expression, a créé des paysages et une architecture réalistes, et a construit un espace tridimensionnel en utilisant la perspective mathématique de Brunelleschi.

Tommaso était très jeune lorsqu’il a commencé à travailler dans la chapelle avec l’aîné Masolino, avec lequel il avait déjà collaboré sur le tableau Sant’Anna Metterza, aujourd’hui aux Offices. Il n’avait que 23 ans. De plus, il est mort très jeune, en 1428, à l’âge de 27 ans. Il existe des légendes selon lesquelles il aurait été empoisonné lors d’un voyage à Rome. Masolino, quant à lui, est parti travailler en Hongrie et c’est pour ces raisons que les fresques de la chapelle Brancacci n’ont pas été achevées par les deux peintres.

Eglise Santa Maria del Carmine à Florence
Intérieur de l’église des Carmes

L’ÉGLISE SANTA MARIA DEL CARMINE
L’église, dont la visite est gratuite (et cela vaut la peine), a été construite aux XIIIe et XIVe siècles. Malheureusement, elle a été gravement endommagée dans un incendie en 1771 et nous pouvons maintenant voir sa reconstruction du XVIIIe siècle. 
Heureusement, les chapelles : baroque Corsini, à gauche de l’autel et de renaissance, Brancacci ont miraculeusement survécues.

Les fresques, bien sûr, se sont noircies et recouvertes de poussière avec le temps, et on a même pensé que Masaccio utilisait des couleurs sombres et désagréables. Ce n’est que dans les années 1990, après une importante rénovation des fresques, que leurs véritables couleurs et nuances ont été révélées et que le public a pu admirer ce chef-d’œuvre.

L’accès à la chapelle se fait par une entrée séparée de l’église, et les visites doivent être réservées en ligne (info à la fin de l’article), surtout cette année où la chapelle ne sera ouverte que certains jours de la semaine.

CHAPELLE BRANCACCI
La photo au début de l’article montre la chapelle actuelle en cours de restauration. Les fresques se trouvent sur deux niveaux, sur les murs de droite et de gauche: nous avons des scènes plus grandes, près de l’autel et sur les piliers: des scènes plus petites. Les peintures représentent le péché originel et des scènes de la vie de Saint Pierre, c’est-à-dire le salut de l’humanité par l’établissement du premier pape et de l’église sur la Terre. D’autres fresques étaient placées dans les lunettes et sur la voûte, mais elles ont été détruites.

Les scènes proviennent du Nouveau Testament et aussi de la Légende dorée écrite par Jacopo da Varazze, très populaire jusqu’au XVIIe siècle. Ce livre raconte la vie et les miracles de nombreux saints et il était de grande inspiration pour la plupart des artistes pour les thèmes religieux.

Chapelle Brancacci, fresques

DESCRIPTION DES FRESQUES
LA TENTATION D’ADAM ET EVE ET PREMIERS HOMMES CHASSÉS DU PARADIS
Les deux scènes opposées sur les piliers sont définitivement entrées dans l’histoire de l’art.
D’un côté, Adam et Eve, encore intacts, équilibrés, heureux, avant de croquer la pomme, ou plutôt, comme le dit la tradition méditerranéenne, la figue. De l’autre côté, dans l’horreur et la honte, couvrant leur propre nudité, nos ancêtres sont bannis du paradis par un ange avec une épée. C’est la scène qui est sortie de la main du jeune Masaccio. La fin du classicisme et de l’élégance, le temps des corps de chair et de sang, massifs et avec leur propre ombre. La fin du Paradis pour les hommes et le début de travail dans la souffrance et la saleté, exposés à la douleur, aux maladies, au vieillissement.

Ces deux scènes peuvent être comparées à la transition entre le style gothique élégant, privilégié dans les cours des aristocrates et des papes, et le style Renaissance, dans lequel l’homme prend sa place précise sur la Terre.

Paiement du Tribut, Masaccio, Chapelle Brancacci

LE PAIEMENT DU TRIBUT
La grande scène à gauche de la chapelle est attribuée à Masaccio. Jésus et les apôtres arrivent dans une ville où ils doivent payer frais, demandé par un collecteur de taxes vêtu d’orange. Jésus ordonne donc à Pierre barbu de pêcher un poisson dans un lac voisin et d’en tirer une pièce de monnaie en guise de paiement.

Les trois épisodes ont été peints de façon continue, dans la même scène, mais les personnages sont facilement reconnaissables. L’épisode est célèbre parce que Jésus prononce la phrase : « à César ce qui appartient à César et à Dieu ce qui appartient à Dieu ». Apparemment, Felice Brancacci a voulu montrer cette scène en se référant à l’institution du cadastre de Florence datant de 1427. Le recensement, comme vous pouvez le deviner, n’a pas été bien accueilli par les riches, qui devaient payer des impôts assez élevés pour leurs propriétés. Cette scène souligne cette obligation de manière allégorique.

Masaccio montre le paysage naturaliste de sa région de naissance, Valdarno, l’expression des personnages et leur représentation correcte dans un espace construit de manière picturale. Que signifie le terme « correct » ? Cela signifie que nous voyons une profondeur et une tridimensionnalité. Vous souvenez-vous des peintures byzantines et médiévales ? Il n’y avait aucune profondeur, proportion ou anatomie. Masaccio a introduit une manière complètement différente de rendre la réalité dans l’art. Une révolution complète qui a donné naissance à la Renaissance.

LA GUÉRISON DE L’INFIRME ET LA RÉSURRECTION DE TABITHA
Une scène dont la paternité est principalement attribuée à Masolino. La guérison de l’infirme à Jérusalem et la résurrection de la bonne femme Tabitha à Jaffa sont présentées dans le contexte d’une ville comme Florence. Le rendu architectural de tous les détails est saisissant. Les Florentins, gardaient-ils des cages à leurs fenêtres et des singes attachés à des ficelles ? Quelle bizarrerie !

Tabitha, Masaccio, Chapelle Brancacci
Détails de Florence

L’auteur montre également les vêtements somptueux de deux personnages, des collants serrés, des caftans et des couvre-chefs colorés et richement décorés. Après tout, Florence était mondialement connue pour ses tissus ! Un peu de marketing ne faisait pas de mal.

Bapteme des néophytes, Masaccio

LA PRÉDICATION DE SAINT PIERRE ET LE BAPTÊME DES NÉOPHYTES 
Ces deux petites scènes se trouvent sur le mur de l’autel. Généralement, on attribue la prédication à Masolino et le baptême à Masaccio, mais il est difficile de le constater avec sûreté. Dans la prédication, on est surtout frappé par la diversification des visages et des expressions. De même, le paysage est pareil à celui du paiement du tribut, en constitue une sorte de continuation.

Dans la scène, de l’autre côté (schéma au dessous), on voit des jeunes en cours de recevoir le baptême, une occasion pour le peintre de démontrer ses capacités de rendre l’anatomie, l’effet mouillé et de l’eau qui tombe comme aussi la sensation de froid.
Se pourrait-il que Masaccio ait déjà pratiqué des dissections pour apprendre l’anatomie humaine ? C’est possible en regardant la scène.


Guérison des malades

GUÉRISON DES MALADES ET LA MORT D’ANANIE 
Dans une scène, on voit saint Pierre, toujours avec une tunique jaune, qui guérit des infirmes en leur passant à côté. Superbe ! Cependant, il ne manque pas la scène de punition. Un riche, Ananie est puni de mort sur place, entouré de personnes. Au lieu de donner tout son argent, obtenu de la vente de sa propriété, en aumône, il voulait en garder une partie pour lui. Dieu voit tout et il vient d’être puni par le seul regard sévère de saint Pierre.

Là encore, il est intéressant de noter l’exhortation à faire l’aumône et à donner de l’argent aux pauvres, dans le contexte d’un registre des biens (1427), destiné aussi à aider les plus pauvres de Florence de façon indirecte. Les deux scènes ont probablement été peintes par Masaccio. De nouveau, regardez les expressions et les détails architecturaux et de paysage.

Résurrection, fresque de Masaccio, de la chapelle Brancacci

RÉSURRECTION DU FILS DE THÉOPHILE
Cette immense scène n’a pas été achevée par Masolino et Masaccio, et dans les années 1580, Filippino Lippi a été chargé de la terminer. Il montre un style différent et surtout, les visages ont l’air d’avoir été collés. Apparemment, lorsque Felice Brancacci a été banni de Florence en 1436 par les rivaux , les Médicis, les visages des membres de sa famille et de leurs partisans ont été « effacés » des fresques, de même que leurs armoiries et leurs symboles. Filippino Lippi a donc dû ajouter des visages complètement différents, certains supposés provenir de masques mortuaires.

Pierre ressuscite ici le fils du gouverneur d’Antioche, mort depuis plusieurs années, tandis que saint Paul, vêtu de vert, s’agenouille et demande le soutien divin. De nombreux personnages célèbres peuvent être vus ici : Coluccio Salutati, le jeune Francesco Granacci, Piero Soderini. À droite, en voix saint Pierre en chaire et les historiens y ont reconnu Leon Battista Alberti et d’autres personnages contemporains a Filipino Lippi.

Portrait de Botticelli, chapelle Brancacci
Portrait de Botticelli ?

DISPUTE AVEC SIMON MAGUS ET CRUCIFIXION DE SAINT PIERRE
La grande scène à droite de la chapelle est principalement attribuée à Filippino Lippi, et bien qu’il ait essayé de préserver le style et le caractère des fresques, elle montre la douceur de certains visages, caractéristique aussi pour son ami Botticelli et le contour sombre des personnages.

Pierre est montré dans une dispute avec le magicien Simon, qui voulait aussi guérir et baptiser les non-croyants. C’est de lui que vient le terme de simonie, c’est-à-dire la vente d’une éminence ecclésiastique. Dans la chaire, l’empereur romain Néron donne la raison à Pierre. De l’autre côté, nous voyons la crucifixion de Pierre à l’envers. Apparemment, les historiens de l’art ont reconnu ici un autoportrait de Filippino Lippi et de Sandro Botticelli.

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Si vous pensez visiter Florence en 2022, je vous conseille vivement de voir la chapelle Brancacci. J’offre des visites guidées de l’autre côté du fleuve, dans le quartier de l’Oltrarno, où se trouve l’église de Santa Maria del Carmine. Et on peut la conjuguer avec la visite de la chapelle. 

COMMENT VISITER LA CHAPELLE BRANCACCI ?
La chapelle est ouverte seulement du vendredi au dimanche et dans des horaires réduits. Il faut réserver la visite d-avance en écrivant à info@musefirenze.it ou téléphonant à 0039 0552768224.

INFO

Le Cimetière fascinant de Florence

Découvrez avec moi un lieu fascinant de Florence: le cimetière monumental de Porte Sante, près de la basilique de San Miniato al Monte.

On n’aime pas tous visiter les cimetières, mais parfois cela en vaut la peine ! Personnellement, j’explore toujours les différents cimetières, j’imagine la vie de certaines personnes et je me plonge dans une atmosphère de silence et de sérénité. En plus, certains lieux de repos éternel abritent de véritables trésors artistiques.

Je vais essayer de vous convaincre de faire une promenade dans l’un des plus beaux cimetières de Florence.

Basilique de San Miniato al Monte à Florence
Vue de la basilique San Miniato al Monte

Le cimetière de Porte Sante, situé sur la colline qui surplombe le piazzale Michelangelo panoramique, à côté de l’église millénaire de San Miniato al Monte, a été créé au milieu du XIXe siècle. Le premier architecte fut Niccolò Matas, auteur de la façade de la basilique de Santa Croce. Plus tard, le cimetière a été agrandi par Mariano Falcini, Tito Bellini et Enrico Dante Fantappié.

Le nom : Porte Sante = la Porte Sainte dérive d’un privilège spécial accordé à la Basilique de San Miniato. Sa porte gauche, ouverte uniquement le vendredi saint, permet à tous ceux qui la franchissent d’obtenir une indulgence plénière.

La chapelle de Collodi, l'auteur de Pinocchio

De nombreuses célébrités du monde culturel et politique ont été enterrées dans le cimetière depuis 1848 à nos jours. La tombe la plus célèbre est une modeste et quelque peu délabrée chapelle de la famille Lorenzini, où repose, entre autres, Carlo Lorenzini, l’écrivain florentin Collodi, auteur de Pinocchio. À proximité, se trouve la tombe de Luigi Bertelli, surnommé Vamba, auteur d’un autre livre pour enfants très célèbre en Italie, le Journal de Gianburrasca.

Ange, Cimetière Porte Sante à Florence
Un ange en marbre

Des peintres tels qu’Antonio Ciseri, Stefano Ussi, Pietro Annigoni, Ottone Rosai reposent dans le cimetière. La collection de peintures d’Annigoni peut souvent être visitée gratuitement au musée de la Villa Bardini à Florence. Ottone Rosai, un admirateur de la beauté toscane simple, était très impopulaire après la Seconde Guerre mondiale en raison de ses sympathies fascistes non dissimulées. Néanmoins, ses peintures sont encore aujourd’hui exposées dans de nombreuses maisons de Florentins aisés. Et même dans la principale gare ferroviaire de Florence : Santa Maria Novella ses fresques sont exposées, bien que peu de gens le sachent…

Parmi les sculpteurs, je ne citerai qu’Augusto Rivalta, Pasquale Romanelli, Libero Andreotti. Libero Andreotti a également réalisé une sculpture pour la tombe de Vamba, déjà mentionnée.

Pasquale Romanelli, cimietère Porte Sante à Florence

Sur la tombe de Pasquale Romanelli, il y a un bel ange avec un marteau à la main, un emblème de l’art de la sculpture. C’est sans doute mon œuvre préférée dans le cimetière !

Franco Zeffirelli, le cinéaste florentin, auteur de nombreuses adaptations des pièces shakespeariennes, par exemple Hamlet avec Mel Gibson ou La Mégère apprivoisée avec Elizabeth Taylor, est décédé en 2019 et est également enseveli au cimetière de Porte Sante. Vous avez peut-être vu ses derniers films Un thé avec Mussolini ou Callas forever?

Galileo Chini, céramiques, cimitière Porte Sante à Florence
Chapelle Pettini

LE STYLE ET DÉTAILS DE CERTAINS MONUMENTS
Une richesse de style, caractéristique du tournant des XIXe et XXe siècles, règne dans le cimetière. Styles : éclectique, néo-gothique, néo-Renaissance, liberty, déco. Certaines des chapelles monumentales ressemblent à des églises en miniature, et pour le mausolée de Pettini, les décorations ont été réalisées par le célèbre maître céramiste Galileo Chini. Une rétrospective de cet artiste se trouve actuellement au musée de la Villa Bardini.

Chapelle Ruspoli, San MIniato al Monte Florence

Sur la photo, vous pouvez voir la chapelle Ruspoli de style byzantin, qui a remporté de importants prix et elle a été mentionnée dans de nombreuses revues d’architecture.

Cimetière Porte Sante à Florence

La majorité des visiteurs restent enchantés de la tombe de frère et sœur Mazzone. Lui, il est mort pendant la Seconde Guerre mondiale et elle, un an plus tard, quelques jours avant son mariage. Leur mère a commandé cette belle et éminente sculpture. Le couple se regarde souriant comme dans une danse, elle avec des fleurs et dans sa robe de mariée et lui dans son uniforme.

Cimetière Porte Sante à Florenc

Emilio Koppel, musicien. Sur sa tombe, nous voyons une sculpture d’une femme triste, allégorie de la musique, avec des instruments abandonnés à ses pieds.

Art déco, Cimetière Porte Sante à Florence

La chapelle Bonciani Francini, avec un intéressant style art déco, a été conçue par l’un des architectes du cimetière, Enrico Dante Fantappié, également enterré ici.

Sauro Cavallini, Art déco, Cimetière Porte Sante à Florence

La tombe du sculpteur Sauro Cavallini, décédé en 2016, avec sa propre sculpture moderne de la Crucifixion.

Ange en broAnge en bronze, Cimetière Porte Sante à Florence

L’une des sculptures les plus photographiées du cimetière, un ange de bronze agenouillé.

HEURES D’OUVERTURE
Le cimetière est ouvert du lundi au samedi de 8 h à 17 h, en été jusqu’à 18 h. Les dimanches et jours fériés et certains jours de la semaine en août, uniquement de 8 h à 13 h.
PS. Le mois d’août c’est le mois des vacances en Italie, il est donc conseillé de vérifier les heures d’ouverture à l’avance.

VISITES GUIDÉES
J’organise des visites guidées de l’autre côté de la rivière, dans le quartier de l’Oltrarno. On monte sur le piazzale Michelangelo, dans le jardin des roses, nous visitons l’église de San Miniato al Monte et, si cela intéresse, le cimetière de Porte Sante.

Écrivez-moi si vous êtes intéressé par une telle visite.